Accor vient de réaliser une étude sur 6000 voyageurs dans 5 pays : Royaume-Uni, Pays bas, Allemagne, Pologne et Russie. Objectif : En savoir plus sur les préférences et envies des voyageurs en 2022. Il s’agit d’une enquête quantitative dont nous ne disposons pas des questions. Nous serons donc prudents sur son interprétation, et ce d’autant que que toute nouvelle d’un rebond positif des perspectives de tourisme aura un impact bienvenu sur le cours de l’action Accor qui toussote depuis 3 ans.
On peut cependant mettre en regard ces informations avec ce que nous sentons de l’évolution économique, sociologique et culturelle qui contextualise les attentes et comportements des voyageurs.
Premier chiffre : 80 % des personnes interrogées prévoient de voyager en 2022. Dommage que nous ne disposions pas des données comparatives sur 2019 pour évaluer dynamiquement cette donnée mais ce chiffre n’est pas tellement éloigné de celui de l’enquête TripAdvisor, qui révèle que 71 % des américains prévoient de voyager en 2022, avec une progression de 8 % par rapport à 2019. Les américains prévoient également de dépenser 29 % de plus pour leurs voyages cette année par rapport à 2019, selon les données de recherche de TripAdvisor.
Parmi les voyageurs prévoyant de voyager en Europe (55% des sondés), la destination privilégiée est l’Italie.
Ne sommes-nous pas gavés de ces images et de ce qu’elles induisent au niveau mental ?
« Lа flехіbіlіté dеѕ réѕеrvаtіоnѕ еt lеѕ nоrmеѕ ѕаnіtаіrеѕ élеvéеѕ fіgurеnt еn têtе dе lіѕtе dеѕ élémеntѕ quе lеѕ Еurорéеnѕ соnѕіdèrеnt соmmе іndіѕреnѕаblеѕ еn 2022 еt аu-dеlà. »
Cette interprétation des résultats appelle à une prudence étant donné que nous ne disposons pas des questions effectivement posées, nous permettant de juger de l’élaboration du questionnaire. En effet, si l’on pose la question « Selon vous, l’application de normes sanitaires élevées, est-elle de nature à motiver votre décision de réservation ? », on a toute les chances d’obtenir un oui massif ! Cela s’appelle de la manipulation statistique.
Si par contre, on dressait une liste de critères contributifs à une décision de réservation en demandant aux voyageurs une notation de 1 à 5 pour chaque critère, on percevrait la valeur relative de chaque critère. Une démarche plus rigoureuse exigerait un premier questionnaire qualitatif à périmètre restreint avec des questions ouvertes, dont l’analyse servirait à situer les critères pertinents à intégrer dans la question d’une enquête quantitative à plus grande échelle.
On peut aussi faire appel à notre intuition. Ayant parcouru les commentaires TripAdvisor de 1330 d’hôtels depuis janvier 2020, je dirais :
En gros, le respect des mesures sanitaires constitue une condition normale et indispensable mais n’est pas un critère de sélection d’un établissement. Par ailleurs, nous sentons bien que la plupart des gens « en ont marre de ce COVID ». Ce que les gens veulent maintenant, c’est passer à autre chose. Est-il donc nécessaire de communiquer sur ce point ?
Mon conseil reste le même depuis un an : Respectez les règles sanitaires mais n’en faites pas le vecteur d’une communication qui risque d’agacer vos clients
La flexibilité des conditions de réservation qu’attendent les voyageurs est à mettre en face des budgets qu’ils sont prêts à dépenser.
On l’a vu en plein cœur de la crise COVID et encore maintenant, la fenêtre de réservation, c’est-à-dire l’anticipation de la réservation, s’est considérablement allongée avec une explosion des réservations à plus de 120 jours d’anticipation, mais aussi un développement très fort des réservations « au dernier moment »
Mettons-nous un instant à la place du voyageur. Le contexte sanitaire mais aussi économique et politique depuis janvier 2020 nous donnent-ils une vision claire de ce qui va se passer et n’avons-nous pas l’impression ne nous ruer tous, dès que cela est possible, vers les même lieux au même moment ?
Par ailleurs, que fait-on après avoir marché longtemps avec des chaussures trop petites ? On les retire avec grand bonheur et on écarte ses doigts de pieds en éventail en savourant cette libération. Les voyageurs ont été Limités dans leurs dépenses de voyage depuis trop longtemps. Cette années pour leurs vacances, ils risquent fort de débrider les cordons de leur bourse cette année pour leur vacances.
Il est donc inutile de limiter leur choix de réservation en cadenassant les conditions de réservation. Offrez un tarif super flexible même si celui-ci est plus élevé qu’il ne l’était auparavant.
16 % des voyageurs questionnés pensent diminuer leurs voyages en avion en 2022 et 18 % prévoient une utilisation plus marquée du train ou de la voiture.
Pas de surprise, nous l’avions dit il y a deux ans : « En avons-nous fini avec l’explosion du voyage aérien et le tourisme low cost dont les bienfaits économiques sont de plus en plus discutables ? Probablement pas mais on sent pointer le ralentissement de sa progression. Avant la crise du Coronavirus, une partie croissante de la population avait déjà commencé à prendre conscience des limites de cette frénétique quête. Cette partie de la population a compris qu’un tourisme boulimique n’est pas compatible avec la préservation d’une planète malade. »
Lire notre article « Ce qui changera pour les hôteliers après la crise du Coronavirus – 1ère partie »
Cette tendance se confirme, comme le montraient plusieurs études que nous présentions le mois dernier dans notre article « Voyages internationaux : Plus jamais comme avant ? »
66 % dеѕ раrtісіраntѕ à l’еnquêtе ѕоnt d’ассоrd : “L’unе dе mеѕ рrіnсіраlеѕ рrіоrіtéѕ lоrѕquе је раrѕ еn vасаnсеѕ еѕt d’аmélіоrеr mоn bіеn-êtrе mеntаl еt dе lаіѕѕеr lе ѕtrеѕѕ dеrrіèrе mоі.”
Là encore, pas de surprise, on le disait il y a deux ans : « La crise du Covid nous a donné des lunettes pour voir que nous embrassons une société hygiéniste qui place la santé comme norme politique au-dessus du reste, où les décisions scientifiques se substituent parfois aux décisions politiques comme si notre société était en mal d’idéaux politiques. »
Dans le même courant de tendances, l’enquète récente du cabinet extenso confirme ce que nous avions prévu il y a deux ans : « les villes moyennes – moins de 200 000 habitants – et les campagnes semblent tirer leur épingle du jeu. Olivier Petit parle d’un redressement progressif des indicateurs” avec un chiffre d’affaires hébergement supérieur de 18 % par rapport à l’avant crise et des prix moyens en hausse de 9 %. »
Lire notre article « Covid : Quelles sont les clés pour comprendre la future demande de tourisme ? »
Si vous disposez d’un Spa, d’un jardin, si votre hôtel est implanté en campagne, c’est le moment de bien scénariser et marketer votre offre.
En conclusion, les enquêtes confirment toujours ce dont nous avons l’intuition mais rassurent ceux qui n’en n’ont pas. Ce qui est certain, c’est que les hôteliers et restaurateurs qui ne changeront pas de braquet et utiliseront les mêmes recettes qu’avant la crise pour en espérer les mêmes résultats, risquent bien de perdre une avance sur ceux qui auront vu plus loin.