Le secteur de l’hôtellerie restauration a perdu 237 000 employés entre février 2020 et février 2021, ce qui représente 18% de personnel en moins alors que nous sommes en phase de reprise. Une des principales préoccupations des managers du secteur de l’hôtellerie restauration est aujourd’hui de trouver du personnel.
Nous vous proposons de faire un état des raisons de ce désamour puis d’identifier ensemble quelques pistes qui vous permettront d’attirer et de fidéliser votre personnel.
Le journal L’hôtellerie Restauration a mené une enquête du 21 au 25 octobre 2021 auprès de 6 302 personnes travaillant ou ayant travaillé dans le secteur CHR pour tenter de comprendre les raisons de cette chute. La revalorisation salariale, le paiement des heures supplémentaires et une meilleure gestion du temps de travail sont les principales causes évoquées mais l’ambiance au travail représente tout de même 30% des réponses, bien plus que la formation ou la sécurité de l’emploi.
Il est dommage que l’enquête ait éludé les aspects conditions de travail et reconnaissance de la hiérarchie, que l’on pourrait imaginer compter parmi les facteurs contribuant à la satisfaction des employés quel que soit le secteur.
Le journal des Palaces a mené de son côté une étude qualitative auprès de 200 personnes, candidats en recherche et salariés. Cette étude intéressante dit en synthèse que « Depuis de nombreuses années, les demandes des salariés et candidats reposent sur les points listés plus haut : salaires, horaires, reconnaissance, bien-être, attractivité du secteur et valorisation des métiers ».
La période de Covid a permis à un certain nombre d’employés du secteur CHR mis au chômage partiel de nombreux mois et pris en charge à 85% de leur rémunération, de se questionner sur leur avenir, de se former et d’investir d’autres secteurs professionnels. Il est probable qu’un grand nombre d’entre eux aient pu bénéficier de la reprise du marché de l’emploi ou que le confort procuré par un état providence limite leur courage à reprendre un travail qui, on le sait, demande sacrifices et n’est pas toujours payé en fonction des heures effectivement travaillées.
Les règles de base de la théorie économique nous enseignent que, ceteris paribus, toute baisse de la quantité d’offre de travail entraîne une augmentation de la valeur d’échange. Dit autrement, moins il y a de candidat, plus il faut les payer pour les conserver, toutes choses égales par ailleurs.
Donc si vous ne changez pas le reste, la réponse à la question est assez simple.
Même au niveau maîtrise, une heure travaillée par un salarié doit être payée. Si l’on s’appuie sur l’enquête de L’hôtellerie Restauration, il est interpellant d’observer qu’un salarié sur deux a la perception que la totalité des heures supplémentaires qu’il effectue ne lui est pas payée.
L’idée n’est pas d’aborder ici les aspects rémunération qui feront l’objet d’un article ultérieur mais plutôt de vous fournir d’autres pistes de réflexion pour vous aider à mieux attirer vos candidats mais aussi à mieux les conserver. De la m^me façon que pour un client, il est moins coûteux de conserver un collaborateur que d’en recruter et d’en former un nouveau. Quelles autres pistes sont possibles en dehors de la revalorisation des salaires ?
Comment présentez-vous votre entreprise ? Précisez en quoi est-elle différente de celle des concurrents, quelles sont vos valeurs, quelles sont les contraintes et avantages ? Il est nécessaire de préparer ce speech, vous n’avez qu’une chance de faire bonne première impression.
Comment traitez-vous les candidats ? soyez gentil avec vos candidats surtout si vous ne les retenez pas. Ils auront envie de revenir soit en tant que candidat plus expérimenté soit en tant que client. Le concept de symétrie des attentions est largement utilisé dans les grands groupes, traitez vos candidats comme vos clients.
Impliquez-vous vos collaborateurs ? Associez les autres membres du personnel au recrutement, ils parleront différemment de vous, seront plus directs et rassureront vos candidats. De plus, cela les valorisera et les fidélisera.
Comment aménager les plannings pour éviter la traditionnelle coupure dont les salariés se plaignent ?
Penser des plannings tournants pour offrir par roulement une ou deux journées le week-end de temps en temps ?
Pourquoi ne pas proposer des temps partiels à des étudiants pour leur permettre de financer leurs études ? Le modèle Leroy-Merlin est assez intéressant en la matière.
Avez-vous mené une réflexion, peut-être avec un fournisseur ou un confrère, un consultant, sur une optimisation de votre dispositif, de votre installation, de vos équipements, de nature à augmenter votre productivité tout en offrant de meilleures conditions de travail ?
Depuis quand n’avez-vous pas félicité chacun des employés de votre équipe ?
Prenez-vous le temps pour mener un entretien annuel plus ou moins formel où vous faites le point avec votre collaborateur ?
Mettez-vous la main à la pâte avec chacun de vos employés, travaillez-vous en binôme avec chacun d’eux de temps en temps ?
Les estimez-vous ? le savent-ils ? Comment leur dites-vous ?
Identifiez-vous les points forts et faibles de chaque collaborateur ? Avez-vous échangé avec chacun d’eux sur ce point de façon bienveillante ?
Quelle autonomie donnez-vous à chaque membre de votre équipe ? Comment faites-vous varier leur niveau d’autonomie selon leurs aptitudes et expérience ?
Vos collaborateurs vous font-ils des propositions et comment les recevez-vous ?
Comment assurez-vous en interne et en externe la formation de votre équipe ?
Que savez-vous des ambitions, souhaits, volonté d’évolution de chacun de vos collaborateurs ?
Comment travailler l’entraide à l’intérieur de votre brigade ? Un collaborateur qui a du mal est-il spontanément aidé par ses collègues ? Comment insufflez-vous cet esprit ?
Faites-vous rire vos collaborateurs de temps en temps ? Savez-vous leur sourire ?
Et cette liste n’est pas exhaustive mais répond, en dehors des aspects de rémunération, aux préoccupations essentielles des salariés de notre secteur.
J’ai été serveur à 17 ans dans un petit hôtel restaurant de bord de nationale à Lusignan. C’était dur. Il fallait se lever à 6h et l’on rentrait le soir se coucher dans une chambre commune à 22-23 heures, et ce 7 jours sur 7. L’art est difficile autant pour le salarié que le manager que j’ai été, plusieurs années ensuite avec une équipe de 90 personnes. Je ne dirais pas que j’étais un manager exemplaire, j’ai juste appris à me poser de telles questions quand un collaborateur m’a expliqué : « on a toujours l’équipe que l’on mérite »
Bon courage !